Introduction pour le lecteur.
Cher lecteur,
Alors que nous pensions l’œuvre d’Alfred Jarry définitivement finie, nous nous sommes trompés. Un nouveau texte a été découvert dans une cave obscure et sombre, décrivant les pratiques du pouvoir à une époque indéterminée. Vous n’y croyez pas ? C'est plausible pourtant. Dans les dernières pages écrites par Jarry [1], Ubu se dirigeait vers la France.
Jarry est un voyant. Beaucoup considèrent qu'Ubu roi, qui, petit rappel, se passe nulle part, c'est-à-dire en Pologne, est une transcription très véridique des horreurs des deux guerres mondiales. Que prévoit alors cette œuvre perdue ? C’est à vous de lire entre les lignes. On peut ajouter, avant de commencer, que Jarry est toujours vivant. Tant que nous continuerons à lire, à représenter, à penser Jarry, il sera d’une certaine manière toujours présent. Je publierai un acte de cette pièce par semaine sur ce blog.
Personnages.
Mère Ubu
Père Ubu
Capitaine Bordure
François 1er: président-monarque de la France.
Jean-Noël Guéridon président du département Y et premier secrétaire de la férération, il a une voix aigre.
Les militants de l’Union Pour Les Macarons (UPLM) : habillés de façon trop clinquante et ne ressemblant à rien ou à pas grand-chose.
Les militants du Parti Sadiquement Néo-Libéral (PSNL) : look soit Bourgeois-bohème, soit ressemblant à des professeurs.
Les militants du Front Populaire Ecosocialocommutrostkiste sont habillés en rouge, ils se détestent tous mais vont quand même suivre la Team Revolution.
Sarko 1er : (très) petit ex-président français.
Jad : futur ex-adhérent du PSNL, il porte un chapeau et des lunettes.
Honorine : Une poissonnière blonde partisane, courtisane et amante de Père Ubu.
Pile : directeur de campagne et trésorier de père Ubu.
Cotice : partisan et amant de mère Ubu.
Le Lapin Blanc de l'Unitay: partisan de l’unité au PSNL.
Fion : ex premier sinistre de Sarko 1er.
Carlos Galfetti : premier ministre de François 1er.
La Team Prude. Comme dans les tragédies grecques, il joue le rôle du chœur et dialogue avec le lecteur. Il deviendra après un personnage néccéssaire: la Team Revolution.
Les vingt rameurs.
Des gardes.
Acte I
(L’acte I se passe sur un bateau qui voyage grâce au vent et à ses rameurs)
Scène 1. Père Ubu, Mère Ubu et la Team Prude.
Père Ubu : Merdre !
Mère Ubu : Tiens, ça faisait longtemps, le mot t’es revenu ?[2]
Père Ubu : Que vous assom’je mère Ubu !
Mère Ubu : Et pourquoi vouloir m’assommer ? Je n’ai rien fait pour l’instant !
Père Ubu : De par ma chandelle verte, j’en ai marre Mère Ubu. J’ai été roi d’Aragon et de Pologne, Prince de Podolie, grand-duc de Posen, duc de Courlande, comte de Sandomir et de Vitepsk, palatin de Polock, margrave de Thorn et cela ne m’a apporté que des désagréments[3]. Ma qualité d’esclave ne m’a pas autant rapporté que je l’espérai. Et voilà que Soliman, sultan des Turcs, nous envoie en France, dont nous voyons les côtes, là où j’ai toujours voulu aller mais où je ne sais que faire.
Mère Ubu : Vous estes bête, Père Ubu, pourquoi ne pas essayer de prendre le pouvoir comme partout ailleurs ?
Père Ubu : Mère Ubu ! Le pouvoir est fatigant ! Un ancien président resté seulement 7 ans au pouvoir a vieilli de 30 ans et deux présidents sont morts de maladies incurables. En outre, je ne vois pas comment nous pourrions prendre le pouvoir en France alors que ce pays applique le suffrage universel !
Mère Ubu : C’est pourtant simple, gros nigaud ! Le multipartisme n’existe pas. Il suffit de prendre le contrôle des deux partis les plus puissants. Ce sera forcément l’un de nous deux qui aura le pouvoir. François 1er a déclaré qu’il ne serait pas candidat si « le chômage ne baisse pas » et une baisse du chômage nuirait à son meilleur allié Pierre Gattaz.
Père Ubu : Tu crois encore à la parole des politiques ?
Mère Ubu : François Ier ne peut pas faire autrement, son premier sinistre Carlos Galfetti est mille fois plus populaire que lui ! Et de toute façon nous ne pouvons pas faire autrement que d’essayer. Nous ne savons pas faire autre chose !
Père Ubu : Ventrebleu, de par ma chandelle verte, tu as raison Mère Ubu…
Mère Ubu (le coupant) : J’ai toujours raison !
Pére Ubu : Non !
Mère Ubu : Si !
Père Ubu : Ah ! Mère Ubu, vous me faites injure et vous allez passer tout à l’heure par la casserole.
Mère Ubu : Eh, pauvre malheureux, si je passais par la casserole, qui te raccommoderait tes fonds de culotte ?
Père Ubu : Eh vraiment ! Et puis après ? N’ai-je pas un cul comme les autres ?[4]
Mère Ubu : Fais attention! La Team Prude va venir modérer cela !
(La Team Prude entre, barre le gros mot de Père Ubu et sort. Si cette pièce est représentée au théâtre, un monsieur très sérieux doit entrer avec un éventail, chanter "je suis la team prude, je nettoie tout et je ressors" puis sortir. Il doit faire cela et des grandes gesticulations avec l'éventail.)
Père Ubu : Je ne sais pas faire autre chose que tenter de prendre le pouvoir, je dois donc essayer. Présente-moi donc les partis en présence afin que nous en prenions le contrôle !
Mère Ubu : Attends, il vaut mieux attendre que l’on soit en France, là-bas il sera plus facile de t’expliquer.
Scène 2. Pile, Cotice, Mère Ubu, Père Ubu, des rameurs
Des rameurs (ramant et chantant sur l’air de La Marseillaise) : Nous ramons vers la Frannnce ! Et cela pour amener ! Pour amener la tyrannie. L'étendard sanglant est levé. Entendez-vous venir Père Ubu avec ses féroces soldats, venir pour égorger vos fils et vos compagnes! Nous, horde d'esclaves, traîtres, et rois conjurés, nous venons faire subir nos outrages ! Nous cohortes étrangères, ferons la loi dans vos foyers ! Aux Armes Père Ubu ! Et marche ! Et Marche !...
Père Ubu (les coupe en rugissant): Ah ! Non ! NON ! NON ! Et NON !
Mère Ubu : Tu es saoul, Père Ubu ?
Père Ubu (criant) : Saoul ou pas, je ne marcherai pas ! Je préserverai mon énorme boudouille, ma pauvre boudaine, ma gigantesque bedaine, de tout effort physique ! Que l’on m’apporte un cheval, je n’irai pas à pied, cornegidouille !
Mère Ubu : C’est très sensé, pour une fois, de vouloir protéger ta boudine, mais ne crie pas, putain de bordel de merde !
Père Ubu : Je crie, si je veux !
Mère Ubu : Non, fais pas chier !
Père Ubu: On ne fait chier que les culs!
(Père Ubu et Mère Ubu se tapent dessus avec des balais innommables)
Pile (à Cotice): Ah l’amour !
Cotice (à Pile): Pff ! Et moi alors ?!
Père Ubu : Et vous deux ! De quoi parlez-vous ?!
Pile et cotice (en chœur ensemble) : De rien ! De rien !
Père Ubu : Taisez-vous et ramez, sinon je vous jette dans la trappe avec mon crochet !
Mère Ubu : Calme toi ! Nous arrivons !
FIN DU PREMIER ACTE
[1] Comme on peut le voir dans Ubu enchaîné et Ubu sur la Butte.
[2] Lire Ubu enchainé.
[3] Ubu Roi.
[4] Ces trois derniers échanges proviennent d’Ubu Roi. Ils conviennent parfaitement ici.